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Causeur : GPA: «Le désir d’enfant ne légitime pas un prétendu droit à l’enfant »


Entretien avec la féministe italienne Francesca Marinaro

Aujourd’hui, à Rome, l’association l’association féministe italienne « Se non ora quando- Libere » organise les deuxièmes assises pour l’abolition de la Gestation pour autrui (GPA), notamment en présence de Sylviane Agacinski. L’occasion pour Francesca Marinaro, responsable politique et associative engagée à gauche, de justifier son refus de la GPA à l’heure où certains justifient par la demande d’enfant le recours au marché mondial des mères porteuses.

Daoud Boughezala. Les assises pour l’abolition de la Gestation pour autrui (GPA) se sont réunies une première fois à Paris le 2 février 2016. En un peu plus d’un an, votre combat a-t-il évolué ?

Francesca Marinaro1 Oui, depuis la réunion de Paris, nous avons progressé dans la bonne direction. D’une part, au cours de la discussion du rapport annuel sur la situation des droits de l’homme dans le monde, le Parlement européen s’est exprimé contre la GPA en votant des amendements sur le sujet. Une large majorité des députés européens a considéré cette pratique comme une atteinte aux droits des hommes et des femmes. D’autre part, les fortes pressions économiques exercées sur les Etats membres du Conseil de l’Europe pour leur faire légaliser le recours aux mères porteuses ont échoué.

 

N’agitez-vous pas un chiffon rouge alors qu’aucun des candidats à la présidentielle française n’entend légaliser la GPA ?

Cette première bataille gagnée par les signataires des assises de Paris ne signifie pas que nous avons gagné la guerre. Même dans les pays qui interdisent la GPA comme la France et l’Italie, les gens se rendent dans des Etats où elle est légale (Russie, Ukraine) et y ont recours en violation de leur législation nationale. Cette question doit être abordée par le Conseil de l’Europe dont une majorité de pays s’oppose à la GPA en vertu des principes communs à toutes les conventions de protection des droits de l’homme, de la femme et des enfants. Pour ne citer que la Convention de protection des droits de l’enfant, son paragraphe 7 attribue explicitement la maternité de l’enfant à la femme qui l’a porté et mis au monde et précise que cette filiation doit être reconnue dans tous les actes administratifs relatifs à la naissance. Or, nos juridictions saisies sur ces questions ont souvent tendance à oublier la mère porteuse au nom de « l’intérêt majeur de l’enfant ». Mais l’intérêt de l’enfant est de connaître sa mère ! Il faudrait reconnaître la dignité de la femme, sans laquelle on ne saurait reconnaître pleinement la dignité de l’enfant.

 

Pendant les débats sur le mariage et l’adoption « pour tous » en 2013, certaines associations homosexuelles ont fait valoir leur droit à l’enfant. Que pensez-vous de cet argument égalitariste ?

Cette problématique ne concerne pas seulement les homosexuels. La majorité des gens qui ont recours à la GPA sont hétérosexuels. D’une manière générale, le concept de droit subjectif est en train de dévier au point de changer de nature. Le droit ne doit pas répondre à un désir. Ici, le prétendu droit à l’enfant répond au désir d’enfant, ce qui est assez dangereux. Se concentrer sur le seul désir peut amener très loin, d’autant que c’est quelque chose de changeant et d’évolutif par nature qui ne saurait légitimer un prétendu droit à l’enfant. Aujourd’hui, on voit une production énorme de droits potentiellement très dangereuse pour le bien commun. Produire une telle quantité de législation sur les droits individuels s’avère préjudiciable à la liberté de chacun. Paradoxalement, l’inflation des droits limite la liberté ! La demande d’enfants ne concerne qu’une minorité d’individus et fait fi de l’intérêt commun. Pour mériter d’être reconnu, un droit doit tenir compte des autres. Aujourd’hui, le dévoiement individualiste du droit profite de l’évolution des nouvelles technologies pour mettre sur le marché la reproduction humaine. C’est un fait nouveau dans l’histoire. S’instaure ainsi une nouvelle division du travail s’instaure entre pays producteurs et pays consommateurs de mères porteuses.

 

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Source : 
Daoud Boughezala – Publié le 23 mars 2017 / Société
http://www.causeur.fr/gpa-marinaro-meres-porteuses-feminisme-43391.html

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