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Défendre l’orphelin : les politiques en sont-ils encore capables ?


Une proposition de loi de réforme de l’adoption, qui a été examinée par les deux chambres, fera l’objet d’une Commission mixte paritaire (CMP) ce 4 novembre 2021.

La mesure la plus importante – comme en atteste son inscription dès l’article 2 – est l’ouverture de l’adoption aux couples non mariés. Quoiqu’inacceptable pour de puissantes raisons, cet article a été voté par la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale mais aussi – mauvaise surprise – par la majorité de droite au Sénat.

Au-delà de l’aberration d’une mesure qui démultipliera le nombre de couples susceptibles d’obtenir un agrément pour adopter alors qu’ils sont déjà cinq à six fois plus nombreux que le nombre d’enfants à adopter, ce projet est lourd de conséquences.

Ne soyons pas irénique, l’adoption n’est pas une simple formalité. Notre propos n’est pas de stigmatiser l’adoption ou d’en discuter le bénéfice, mais simplement de dévoiler librement et simplement les souffrances que cette situation exceptionnelle peut engendrer. Dans l’enfant, les deux parents se trouvent liés : c’est la filiation ! Couper le fil qui relie l’enfant à ses parents charnels est traumatisant pour l’enfant. Cela ne signifie pas que les parents adoptifs ne seront pas de bons parents, ni que les parents biologiques sont des parents parfaits. Le fil qui relie les parents biologiques à leur descendance ne peut être coupé qu’au prix d’une souffrance tragique.

Cette douleur doit être rappelée par honnêteté. Si traditionnellement, et aujourd’hui encore, le père coupe le cordon ombilical de l’enfant, c’est que le lien matériel qui unissait la mère au fœtus est remplacé par le lien familial. On coupe pour mieux relier. On sépare pour mieux se rapprocher. C’est ainsi que parlent les corps. Le lien familial n’est pas un symbole abstrait, c’est une réalité tangible et corporelle. L’adoption pallie ce lien originel mais ne le remplace pas. Cela ne signifie pas que le lien de l’adoption est faible, ni que le lien familial est absolument nécessaire. Mais l’adoption ne peut donc être le modèle naturel de la famille parce que c’est toujours une souffrance pour l’enfant de grandir sans ce lien primitif et originel qui l’unie à ceux qui lui ont donnéla vie.

Enfin, cette souffrance concerne également les parents adoptifs. Un enfant adopté ne remplace pas un enfant naturel et les parents adoptifs ne remplacent pas les parents naturels. L’adoption ne comble pas un manque, mais invente autre chose. Cette invention merveilleuse est toutefois un chemin difficile. Ne mentons pas aux parents ! Ne mentons pas aux enfants ! Ne faisons pas de la loi une machine à broyer les êtres ! Au contraire, sachons voir la souffrance, reconnaître les difficultés et enfin placer des limites à ne pas franchir pour le bien de chacun. L’adoption n’est pas une solution : elle ne supprime pas le problème. L’adoption est une invention qui répare : elle ne nie pas la violence du réel, mais elle l’accompagne courageusement.

C’est précisément ce qui justifie les critères pour pouvoir adopter, à commencer par celui de former un couple aussi stable que possible. De même que le mariage crée la filiation à travers la présomption de paternité, ce même mariage est nécessaire pour adopter. Par l’engagement qu’il implique, il vient consolider les garanties apportées par le couple adoptant, et vérifiées par une enquête sérieuse et approfondie des services sociaux.

Ainsi, à nouveau, osons poser ces questions simples : est-il acceptable d’user de démagogie pour ce qui concerne l’adoption ? Doit-on l’utiliser pour donner des preuves d’une égalité que personne ne demande, en la matière, entre couples mariés et non mariés ? Et surtout, peut-on instrumentaliser l’adoption pour servir les désirs des parents « d’intention » qui veulent se faire reconnaître comme parents de l’enfant qu’ils ont commandé par GPA à l’étranger, l’adoption étant alors utilisée pour effacer la mère de l’enfant et prendre sa place ?

Entre le désir d’enfant propre aux candidats à l’adoption et les besoins des enfants orphelins, qui n’attendent rien d’autre qu’un père et une mère, il y a une rencontre mais aussi une distinction à souligner.

Le besoin de l’enfant restera toujours plus fort que le désir des adultes. C’est la grandeur d’une société de le respecter. Ce serait la grandeur des élus de défendre les orphelins en s’y opposant lors de la Commission mixte paritaire de ce jeudi 4 novembre.

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